Parti Hégémonique, Parti Dominant… la réalité derrière ces termes peut être très malaisante pour certains, elle est un objectif à atteindre pour d’autres… Il faut reconnaître que la notion de parti hégémonique met d’office en perspective la polarisation du système partisan, et on est en droit de s’y intéresser -aujourd’hui plus que jamais – mais encore, en savoir plus sur le rôle qu’elle induit vis à vis des autres partis et des éléments qui la fondent. Nous avons pour l’exercice dans Jeudi Politiques, pris de court Nourou Dine Saka Saley
RBM : À quel moment un parti est-il dominant, et y a t-il une distinction entre dominance et hégémonie ?
À la première question, je distinguerais la dominance qui pour moi est une résultante d’un abus, soit des lois ou d’une pratique électorale qui donne une certaine avance, et je dirais même une certaine capacité de cannibalisme et d’absorption des autres partis par un seul parti qui se veut dominant.
Je vais l’opposer à l’hégémonie qui est pour moi, la résultante du jeu démocratique qui fait que par exemple, il y en a un qui, dans les conditions normales et de transparence électorale se distingue largement du lot.
Pour illustrer, ce peut être un parti qui tout seul a la majorité dans des conditions normales. On parlerait dans ce cas de l’hégémonie d’un parti qui est imposée par la force de la démocratie.
RBM : Quelles sont les racines de la dominance et quelles en sont les conséquences?
Pour moi, cela prend racine des cas d’abus, soit de texte, soit de pratique politique, ou encore de pratique électorale…et donc à une certaine absence de transparence, de loyauté et de clarté dans le jeu politique. Comme conséquence immédiate et logique, c’est que le risque d’un diktat de ce parti est grand.
S’il est dominant, il s’oriente un peu plus vers le contrôle d’une certaine majorité qu’elle puisse être simple, qualifiée ou autre… et donc le fait que ce soit la volonté de ce parti là qui s’impose sans possibilités de contrebalance. Le risque à long terme c’est que l’on s’oriente vers un système de pensée unique ou de pensée contrôlée par l’orientation politique de ce parti dominant. En démocratie on ne peut pas parler de parti dominant. C’est un NON catégorique pour moi ! Ce sont les caractéristiques des régimes on va dire totalitaires ou en voie d’autocratie.
RBM : Le système électoral favorise t-il la dominance de certains partis?
Il est évident que c’est le système électoral qui favorise la dominance de parti, et c’est souvent la résultante d’un choix délibéré du groupe bénéficiaire de la dominance, et que ce groupe travaille à renforcer sur le fondement des lois justement. Comme j’ai mentionné supra, c’est un système électoral qui est fabriqué le toutes pièces. Ce n’est qu’ un système électoral contrôlé par un pouvoir donné, qui amène à donner la priorité ou bien la prépondérance à un parti qui devient dominant. Un système électoral ouvert et libre ne peut faire naître ou laisser exister un parti dominant. Lorsqu’on prend l’exemple de la France, il y a un parti gouvernant qui frôle la majorité mais qui a dû être tributaire de l’accord, la participation et du concours d’autres partis pour avoir une majorité au parlement. Dans cette alliance, ce parti est en situation de dominance, mais puisque sans les autres il ne peut pas avoir la majorité on ne peut pas le qualifier de parti dominant. Ils constituent la majorité mais malgré cela, on ne peut pas les qualifier de dominant parce qu’à eux seuls ils ne peuvent pas imposer par exemple des décisions au niveau du parlement. C’est vrai qu’ils ont l’exécutif, mais à l’Assemblée nationale française la commission des finances est contrôlée de facto par l’opposition, et d’autres commissions sont contrôlées par l’opposition donc la prépondérance même du parti En Marche ne lui permet pas d’avoir certains droits que d’autres partis se seraient octroyés dans d’autres pays dans d’autres circonstances. Le parti présidentiel “En Marche” est hégémonique sans pour autant avoir la majorité, parce qu’il a le plus grand nombre de sièges et c’est vers lui que convergent les alliances (tant de droite que du centre). Pour dire que celui qui attire naturellement les autres (y compris par intérêt de gouvernance) c’est celui qu’on peut qualifier de parti hégémonique.
RBM : Sans vouloir être tendancieuse, pensez vous qu’au Bénin par exemple nous avons des partis dominants?
En ramenant l’exemple à notre pays le Bénin, nous avons un parti dominant artificiellement morcelé en deux. Et les relents de cannibalisme politique se font ressentir sur les satellites que sont les partis dits soutenant l’action du gouvernement et totalement inexistants au niveau électoral. Plusieurs voix internes s’amusent à leur prédire et même conseiller, une goulue et certaine absorption par l’une des deux poches de l’estomac politique présidentiel.
C’est à peu près Madame, ma conception de la différence entre parti dominant et parti hégémonique.
Merci Mr Saka Saley…
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