Au Togo, Gabriel Messan Kodjo Agbéyomé va briguer la magistrature suprême pour la deuxième fois . Après avoir occupé plusieurs postes politiques, l’ancien Premier ministre rêve désormais de loger au Palais de la Marina.
Aujourd’hui âgé de 66 ans, l’homme qui occupe la scène politique togolaise depuis trois décennies n’a pas eu une carrière totalement « clean » comme le note le journal Focus Infos qui, dans un article publié il y a quelques années, est revenu sur le « parcours sombre » du candidat de Mgr Kpodzro. Extrait…
Natif de Tokpli dans la préfecture de Yoto, Agbéyomé Kodjo qui fête ses 59 ans cette année, fut étudiant de l’université de Poitiers en France, où déjà il était indexé comme l’un des activistes de la JRPT (Jeunesse du Rassemblement du Peuple Togolais) et s’est fait la réputation peu flatteuse d’indic pour le pouvoir de Lomé.
Nanti d’un diplôme en gestion des organisations au début des années 80, il entama une brillante carrière d’abord comme Directeur Commercial de la SONACOM (Société nationale de Commerce) entre 1985 et 1988 avant de rejoindre ensuite le gouvernement au poste de ministre de la Jeunesse, des Ports et de la Culture en décembre 1988. C’est avec ce portefeuille qu’il assistera à la Conférence national souveraine, qui restera une des blessures de sa vie, avec ce spectacle insolite et improbable offert devant les caméras de la télévision nationale, d’un ministre pleurant à chaudes larmes alors qu’il était pris à partie par les conférenciers.
Cet évènement qui l’a marqué et blessé son ego « surdimensionné » en rit un de ses amis, professeur à l’Université de Lomé, déterminera par la suite ses postures politiques et explique son positionnement radical aux côtés de feu Gnassingbé Eyadéma. Il sera ainsi l’un des faucons du régime, enfermé dans un règlement de compte à rebours avec ceux qu’il estime l’avoir humilié : les opposants.
Ejecté lors du premier gouvernement de transition dirigé par le Premier ministre Joseph Kokou Koffigoh en septembre 1991, il reviendra en force un an plus tard avec le portefeuille de l’administration territoriale et de la sécurité. Il aura maille à partir avec le chef de gouvernement qui le limogera. Monsieur Agbéyomé Kodjo refusera de quitter ses fonctions, allant jusqu’à menacer Me Koffigoh de le faire interpeller. Finalement, c’est sa nomination comme Directeur général du Port autonome de Lomé (PAL) qui lui fera quitter le gouvernement.
Il a laissé à la direction du PAL plutôt de bons souvenirs et un bilan flatteur, même si pèsent toujours sur lui des soupçons de détournements. Sur les rumeurs de la célébration de son « premier milliard de FCFA » quand il était ce poste, il affirme la main sur le cœur que la fête dont il s’agit était celle de l’anniversaire de sa femme.
Les liens qui l’unissent à la plupart de ses compagnons les plus fidèles d’aujourd’hui, ou à certains de ses bailleurs de fonds datent de cette époque : Gérard ADJA fut l’un de ses collaborateurs comme Jonas SILIADIN, tandis que les hommes d’affaire dont Pierrot Akakpovi ou Gabriel Améyi et bien d’autres, ont prospéré grâce à lui et n’en ont pas eu la mémoire courte.
Elu député RPT dans la 3è circonscription de Yoto en 1999, après avoir été seul en lice, il sera désigné Président de l’Assemblée nationale. A ce poste, il manœuvra pour faire limoger le Premier ministre d’alors, Eugène ADOBOLI, un haut fonctionnaire international vivant en Suisse depuis des lustres, déconnecté des réalités togolaises et propulsé à cette fonction par feu Gnassingbé Eyadéma, par un concours de circonstances. Monsieur Agbéyomé Kodjo n’a jamais éprouvé quelque sympathie pour cet homme, qu’il affublait de « tocard » (azui dans le texte !).
Il finira par avoir la tête d’ADOBOLI, aux termes d’un vote de confiance pour lequel il a tiré les ficelles de bout en bout grâce à des intrigues et manigances dont il a seul le secret, en août 2000. Nommé à la Primature à la place de celui contre lequel il a comploté, il y restera à peine deux ans, rattrapé par sa« boulimie du pouvoir et sa mégalomanie », selon Fambaré Natchaba.
Il faut dire que depuis longtemps, il occupait une place privilégiée auprès de feu Gnassingbé Eyadéma qui le considérait comme « son fils » ; presque « le meilleur d’entre nous » comme disait Jacques Chirac, l’ancien Président français d’Alain Juppé. « C’est le seul qui croisait les jambes en présence du Boss (feu Gnassingbé Eyadéma ndlr) » nous confirme un habitué des salons de Lomé 2, la résidence du Chef de l’Etat.
«Son zèle pour bien paraître devant le Boss n’avait d’égale que son ambition démesurée qu’il arrivait à cacher de moins en moins », poursuit-il. Pour mettre toutes les chances de son côté, il ira jusqu’à se mettre en couple avec l’une des filles d’Eyadéma. Par pur intérêt. « Même s’il aime les femmes (il affectionne dire : elle est canon ; un terme devenu un code), avec la fille Gnassingbé, ce fut par simple stratégie » croit savoir un de ses anciens collègues du gouvernement.
Le 27 juin 2002 pourtant, en conflit avec le Chef de l’Etat, il fera publier un brûlot contre le régime dans le journal Akéklé avant de s’exiler en France, dont il reviendra le 8 avril 2005.
Son acte, jugé courageux par une partie de l’opinion, avait été sévèrement décrié par ses camarades du RPT, qui n’ont pas hésité à le lyncher médiatiquement ; considérant que c’était une trahison envers celui à qui il devait tout. Ils ne sont pas les seuls. Pour Gilchrist OLYMPIO aussi, pourtant à l’époque au faîte de sa popularité et farouche opposant à Gnassingbé Eyadéma. « L’acte que vous avez posé est contre nature. En cas de désaccord avec celui qui a fait de vous ce que vous êtes, vous prenez simplement vos distances, sans faire grands bruits » lui aurait dit, le Président de l’UFC, lors d’une rencontre pendant son exil parisien.
RelaisRBM
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