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DES REFORMES AUX ALLURES DE RESTRICTION DES LIBERTÉS DÉMOCRATIQUES ?

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« …On ne saurait concevoir aujourd’hui une démocratie sans parlement, c’est-à-dire sans élections, sans partis politiques, sans campagnes électorales et finalement sans opposition. »

Le jeudi 26 juillet 2018, les députés de la 7è Législature ont voté la loi No 2018-23 portant charte des partis politiques au Bénin. Celle-ci fixe désormais de nouvelles contraintes pour l’existence des partis politiques.

Une lecture critique de cette loi donne à constater que l’objectif de ses initiateurs semble de réduire le nombre de partis politiques, d’organiser les élections sans compétition et de museler l’opposition ; ce qui visiblement montre une volonté sournoise et nuisible à la liberté politique. Car, entre autres contraintes évoquées dans cette loi, il y a l’exigence de 15 membres fondateurs par commune, soit 1.155 membres au plan national ; et la barre de 17 députés dans six différentes circonscriptions électorales fixée avant qu’un parti ne bénéficie des financements publics. Le comble est qu’il y a une disposition de cette loi dans son article 49 qui projette des sanctions aux contours encore flous en cas de son non-respect par les partis politiques.

Il est donc clairement affiché une intention d’asphyxier les partis politiques et de militer pour une Assemblée Nationale monocolore. Et c’est cet esprit de destruction de la démocratie que le professeur Jean – Pierre MACHELON de l’université René Descartes, Paris 6 combattait en 2004 dans son article intitulé « Le rôle du parlement dans les démocraties contemporaines » lorsqu’il déclarait : « …on ne saurait concevoir aujourd’hui une démocratie sans parlement, c’est-à-dire sans élections, sans partis politiques, sans campagnes électorales et finalement sans opposition. » Mais que constatons-nous actuellement ?

Une lecture croisée de la charte des partis politiques et du nouveau code électoral actuellement en examen au Parlement montre que le régime actuel appuyé par les députés du BMP (Bloc de la majorité présidentielle – ndlr) semblent orchestrer un complot contre la démocratie béninoise en évitant le challenge électoral qui doit avoir lieu dans sept (7) mois environ c’est-à-dire en mars 2019. En optant pour deux cents (200) millions de caution par liste et quinze pour cent (15%) du suffrage national avant de prétendre valider les sièges pour une liste, le régime actuel a l’intention d’éliminer les potentielles listes aux élections législatives prochaines. Ce faisant, les initiateurs de ces lois pensent trouver solution à leur impopularité.

Le comble est le dernier acte du régime dit de la Rupture qui, par la voix de son ministre des finances, a publiquement lâché qu’il revient désormais aux internautes qui critiquent le pouvoir de payer plus que les autres. Cette aberration pour justifier l’augmentation des frais d’internet en République du Bénin est la preuve patente que le gouvernement est bien en phase avec sa politique de restriction des libertés d’expression. Dans le fond comme dans la forme, les propos du ministre apparaissent comme un refoulement qui dévoile combien ce régime est réfractaire aux critiques formulées contre ses agissements.

Du coup, c’est un pan de notre système démocratique, sinon, son pilier fondamental qui est mis à mal. Or, depuis la conférence des forces vives de la nation de février 1990, le Bénin a opté pour le multipartisme intégral. Ce choix implique l’engagement au respect des conditions non négociables dans les démocraties contemporaines comme celles énumérées par Dahl et reprises par Lijphart que cite Erdal Onar, en ces termes :

  • la liberté d’expression ;
  • le droit de vote ;
  • l’existence de sources variées d’informations ;
  • des élections libres et régulières ;
  • l’existence d’institutions permettant au gouvernement de mettre en œuvre les politiques qui ont été approuvées par le peuple ;
  • le droit de participer aux fonctions publiques ;
  • la liberté de fonder des associations et de participer à celles-ci ;
  • le libre exercice de la compétition électorale entre les dirigeants politiques.

A comparer au cas de la France, la nouvelle loi portant charte des partis politiques et celle portant code électoral en examen au parlement du Bénin ne respectent nullement les principes démocratiques ci-dessus énumérés. En effet, dans un pays comme la France qui est un modèle de démocratie pas des moindres, il suffit de créer une association à caractère politique suivant la loi de 1901 et de faire une déclaration à la préfecture ou à la sous-préfecture de la localité. Ce n’est qu’après cela qu’il faut aller à la quête d’adhérents à travers les pétitions et les meetings.

Pour régler le problème de la prolifération anarchique des partis politiques, il suffisait simplement d’appliquer la loi No 2001-21 du 21 février 2003 portant Charte des partis politiques. En effet, cette loi dispose en son article 7 que : « Les partis politiques sont tenus de participer aux élections nationales et locales. Tout parti perd son statut juridique s’il ne se présente pas seul ou en alliance de candidats à deux élections législatives consécutives… ». Malheureusement, cette loi n’a jamais été observée en cette disposition.

Sous le régime actuel, les parlementaires du Bloc de la majorité présidentielle se comportent en “représentants souverains de la nation, pendant qu’ils doivent être les représentants de la nation souveraine“. C’est dommage que dans notre pays la démocratie soit foulée aux pieds par des gens qui n’agissent que pour leurs intérêts égoïstes et machiavéliques, dans le seul but de satisfaire les ambitions d’une volonté particulière et de chercher à réduire la minorité parlementaire au silence.

L’Assemblée Nationale est, en principe, un lieu où les députés doivent opiner librement, une tribune où la parole doit être libre. C’est d’ailleurs la liberté de la parole qui confère à ce lieu le nom de ‘’parlement’’ qui est un nom dérivé du verbe parler. Clémenceau n’a-t-il pas clamé depuis le 04 juin 1888 à la Chambre des députés : « Oui ! Gloire aux pays où l’on parle ; honte au pays où l’on se tait ». ?

Face à la situation socio-politique actuelle faite de méfiance, de vote de lois scélérates, les Béninois sont-ils toujours dans un Etat démocratique ? Les députés se comportent- ils comme des élus de la nation ou comme des pantins télécommandés ? N’assiste-t-on pas à la destruction de l’édifice démocratique béninois ?

Par Dr Félicité Adolé Akueson.

#ReporterBénin

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