Accueil À LA UNE POUR L’APRÈS COVID19, L’UNIVERSITÉ DU 3EME MILLÉNAIRE : DE LA NÉCESSITE DE REPENSER L’UNIVERSITÉ ET SON RÔLE DANS LA CITE…
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POUR L’APRÈS COVID19, L’UNIVERSITÉ DU 3EME MILLÉNAIRE : DE LA NÉCESSITE DE REPENSER L’UNIVERSITÉ ET SON RÔLE DANS LA CITE…

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Face à la crise du COVID19, Dr. Alain CAPO CHICHI appelle à repenser l’Université, sa structure et son rôle dans la cité : Il préconise l’Université du 3ème millénaire.

Dans cet entretien, le Pdg de l’Institut CERCO aborde de front une question qui reste depuis plusieurs années déjà l’un des grands enjeux du continent et auquel personne n’ose vraiment trouver solution. Il démontre par son approche que la crise sanitaire que traverse le monde  sonne le glas de l’indifférence des acteurs d’un système qui nécessite une refonte…  

QUESTION 1 : Pourquoi faut-il repenser l’Université aujourd’hui ?

Dr. Alain CAPO CHICHI : La crise actuelle de la distanciation sociale nous a contraints à une Université physiquement fermée : les étudiants sont à la maison et ont accès à d’autres ressources, d’autres universités, d’autres sources de connaissances à travers l’internet et le professeur se trouve totalement isolé voire inexistant. Cette situation, qui risque de durer, doit nous amener à abandonner le modèle transmissif de la formation que nous utilisons depuis des lustres et qui a montré ses limites, pour aller vers un modèle qui rend l’étudiant moins dépendant, mais plus autonome, actif et créatif. Désormais, le professeur n’est plus devant son étudiant et est contraint de faire le mort. C’est le modèle idéal du triangle pédagogique formalisé  par Jean HOUSSAYE pour que l’apprenant s’approprie le savoir. Ainsi, la question qui se pose aujourd’hui, c’est comment repenser le rôle du professeur pour qu’il accompagne l’apprenant dans son apprentissage. Plutôt que d’être un transmetteur de savoir, il doit rapidement devenir un coach, un mentor. L’Université, jusqu’à présent, est restée dans un rôle de formation et fait de celle-ci une finalité, alors que la finalité de la formation doit être la résolution des problèmes, la créativité et l’innovation.

L’enjeu doit être l’adaptation de la connaissance à l’évolution du monde pour résoudre les besoins de la communauté.

Alain CAPO CHICHI

QUESTION 2 : Qu’est-ce que cela  signifie concrètement ?

Dr Alain CAPO CHICHI : Lorsqu’un  professeur prépare un cours, dans ses objectifs pédagogiques, il peut viser six (06) niveaux qui, selon Benjamin Bloom, se déclinent comme suit : la connaissance (niveau 1), la compréhension (niveau 2), l’application (niveau 3), l’analyse (niveau 4), la synthèse (niveau 5) et la création (niveau 6). Le problème dans nos universités est que 99% des professeurs se limitent au niveau le plus bas de l’échelle,  le niveau de la connaissance pour définir leurs objectifs pédagogiques. Si on prend par exemple un cours sur la téléphonie : quand il ne vise que la connaissance, son objectif serait que les étudiants vont apprendre la téléphonie, connaître les éléments constitutifs d’un téléphone etc … Or, s’il vise le niveau le plus élevé la création, l’étudiant doit être capable non seulement d’apprendre mais surtout doit utiliser, concevoir et même  créer un téléphone.  Si vous prenez 99,99% des cours qui se font dans la plupart des universités africaines, nous ne visons que la connaissance, alors que celle-ci ne sert à rien si elle n’est pas utilisée pour résoudre les problèmes de la communauté. Le second problème se trouve dans la validité de la connaissance elle-même. En effet, la connaissance évolue. Elle n’est pas figée et devient rapidement obsolète au rythme de l’évolution de la technologie, de l’environnement juridique, économique, etc. Donc nous enseignons quelque chose qui bouge et n’est plus établie comme jadis. Il y a quelques années, un étudiant pouvait apprendre quelque chose pendant quatre (04) ans et utiliser la connaissance acquise pendant trente (30) ans. Mais aujourd’hui, ce qu’on apprend à un étudiant pendant ses études devient obsolète avant même qu’il ne quitte l’Université. Ainsi, l’enjeu doit être l’adaptation de la connaissance à l’évolution du monde pour résoudre les besoins de la communauté. Plutôt que de chercher à transmettre la connaissance à l’apprenant pour qu’il la garde pendant trente (30) ans, l’urgence doit plutôt être de le former pour qu’il utilise la connaissance pendant l’apprentissage pour résoudre les problèmes et savoir s’adapter lui-même. Donc aujourd’hui, l’enjeu n’est plus la connaissance, mais le problème qu’il va servir à résoudre. L’objectif des cours dans nos universités devrait donc être : comment préparer l’apprenant ou l’étudiant pour qu’en face d’un problème, il sache mobiliser les ressources (sa propre connaissance, la technologie, l’internet, ses amis, l’intelligence collective etc.) pour le résoudre.

Il faut adopter dans nos universités, les pédagogies actives et innovantes. 

Alain CAPO CHICHI

 QUESTION 3 : Que doit-on retenir par-là, préconisez-vous donc l’approche par problème ?  

Dr Alain CAPO CHICHI : Absolument. Il faut adopter dans nos universités, les pédagogies actives et innovantes. Ces pédagogies qui rendent l’étudiant acteur de sa propre formation où depuis son entrée à l’Université, ce dernier dispose d’un projet professionnel ou personnel et étudie à chaque cours en fonction de ce projet professionnel. Il n’est donc plus en compétition avec ses camarades mais il collabore d’ailleurs avec eux pour s’améliorer. L’important, c’est que l’étudiant puisse utiliser avec profit les ressources de son environnement, exprimer ses besoins et devenir autonome dans son approche des savoirs. Il doit savoir s’autoévaluer, gérer ses compétences et se former “tout au long de la vie”.

QUESTION 4 : Donc, votre approche est centrée sur l’apprenant ?

 Dr Alain CAPO CHICHI : Absolument, puisque c’est lui qu’on veut transformer. Donc, c’est lui qui doit être accompagné et c’est lui que le professeur, qui devient son coach, doit aider à révéler son talent. Plutôt que de le stigmatiser dans un domaine, dans une filière ou dans une classe avec des niveaux (1ère, 2ème et 3ème année), l’étudiant doit avoir un parcours totalement personnalisé, parce que nous sommes nés différents et n’avons pas les mêmes aptitudes. Donc, les formations dans les universités africaines doivent tenir compte du rythme d’apprentissage de l’apprenant pour le rendre utile à la communauté.

QUESTION 5 : Parlez-nous de la co-création et de la conception participative ?

Dr Alain CAPO CHICHI : Aujourd’hui, plusieurs chercheurs et praticiens se sont rendus compte que pendant la 1ère phase de résolution d’un problème qu’est l’étape de la génération d’idées nouvelles ou de créativité, les compétences individuelles sont intéressantes, mais ce qui prime c’est la rencontre, la co-création, la collaboration, c’est aussi l’interdisciplinarité. Cela change fondamentalement le rôle de l’Université, car plutôt que d’être un centre d’enseignement ou de formation disciplinaire, elle doit être un centre qui favorise la rencontre, l’intelligence collective. Elle doit ramener à l’Université l’ensemble des parties prenantes autour d’un problème (entreprises, paysans, designer, startups, artistes, entrepreneurs, les politiques, etc.). L’université doit devenir un espace d’innovation, de collaboration, et de co-création. C’est ça l’université du 3ème millénaire.

 La crise du COVID a créé un précèdent qui va profiter aux jeunes africains…

Alain CAPO CHICHI

 QUESTION 6 : Quelle sera la structure et le rôle de  cette nouvelle Université ?

 Dr Alain CAPO CHICHI : Cette Université doit réduire les heures d’enseignement qui sont utilisées par des professeurs qui confondent cours et supports de cours. Les heures de cours ne doivent plus être utilisées pour laisser parler uniquement le professeur qui transmettra une connaissance qui va devenir très vite obsolète. Les apprenants doivent apprendre à être autonomes, à travailler en groupe. Ils doivent être impliqués dans des projets orientés vers les besoins de la communauté. L’Université devient ainsi un lieu d’expérimentation, de simulation, de conférences ouvertes au public, d’implémentation et de valorisation des produits et services.  Dans cette université, nous devons avoir tous les outils pour le design et le prototypage : découpeuse laser, fraiseuse numérique, imprimantes 3D, robots, cartes électroniques, etc. Ces nouveaux outils sont indispensables pour appréhender tous les métiers de demain, car tous ces métiers seront influencés par l’intelligence artificielle, les objets connectés, la réalité augmentée, la robotique, les big data, la blockchain etc.  Aussi, l’approche de la nouvelle université doit-elle être interdisciplinaire et orientée vers la mutualisation des ressources (cours, espaces, professeurs, technologies, étudiants).Un étudiant n’a plus d’Université en tant que telle mais peut étudier dans plusieurs universités à la fois. La mobilité des enseignants et des étudiants deviendrait alors une réalité. Cette nouvelle forme d’Université n’est plus un rêve : elle existe déjà dans plusieurs pays et depuis cinq (05) ans, le Groupe CERCO a travaillé et l’a mise en place à Bassam en Côte d’Ivoire. Le Groupe l’a dénommé: le camp du futur. C’est le modèle adopté par les meilleures universités du monde comme HAVARD, MIT, etc. Nous devons donner aux jeunes africains la chance de vendre leurs compétences au monde. La crise du COVID a créé un précèdent qui va profiter aux jeunes africains : le télétravail et le freelance. Nos jeunes bien formés peuvent aller chercher depuis leur pays les meilleurs salaires dans le monde.

 Cellule de Communication/Dr Alain CAPO CHICHI

 

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